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Accountancy

Faites valoir vos droits en cas de retard de paiement par votre client !

Sébastien Gatellier Sébastien Gatellier

La loi du 2 août 2002 prévoit tout un dispositif de règles applicables par défaut en matière de règlement des transactions commerciales, dans la mesure où les parties n’ont pas convenu d’autres mesures spécifiques entre elles. Petit rappel des principaux droits dont dispose le créancier.

Qui est concerné ?

Par transaction commerciale, la loi définit toute transaction entre des entreprises (B2B) ou entre des entreprises et les pouvoirs publics (B2G) qui conduit, contre facturation, à la fourniture de biens, à la prestation de services ou à la conception et l'exécution de travaux publics.

Les entreprises sont bien entendu à considérer au sens large, c’est-à-dire incluant tous ceux qui exercent leur activité commerciale sous forme de société ou sous forme indépendante, pour autant qu’ils disposent simplement d’un numéro d’entreprise.

Règlement endéans les 30 jours civils par défaut mais 60 jours civils au plus

Les parties contractantes sont libres de définir les conditions qui leur conviennent en matière de délai de règlement des factures relatives aux prestations fournies ou au biens délivrés. Cependant, dans ce cas la loi fixe un délai maximal qui ne peut excéder soixante jours civils. Toute clause contractuelle qui prévoit un délai de paiement plus long est réputée non écrite. Pour certains secteurs spécifiques, le Roi peut cependant autoriser un délai supérieur à celui de soixante jours civils mais il s’agit plutôt de cas d’exception.

Lorsque la date ou le délai de paiement n'est pas fixé dans quelconque contrat ou conditions générales, tout paiement en rémunération d'une transaction commerciale entre entreprises doit être effectué dans un délai de trente jours civils.

Les délais évoqués ci-avant se calculent toujours à partir du jour qui suit celui :

  • soit de la réception, par le débiteur, de la facture ou d'une demande de paiement équivalente
  • soit de la réception des marchandises ou de la prestation de services, si la date de réception de la facture ou de la demande de paiement équivalente est incertaine ou si le débiteur reçoit la facture ou la demande de paiement équivalente avant les marchandises ou les services.

Il est important de noter par ailleurs les points suivants :

  • les éventuelles périodes nécessaires à la vérification des factures doivent être incluses dans les délais susmentionnés
  • il n’est plus désormais possible de convenir de clauses contractuelles concernant la date de réception des factures
  • enfin, la loi et les amendements n’affectent pas les dispositions de l'arrêté royal du 26 septembre 1996 fixant les règles générales d'exécution des marchés publics et des concessions de travaux publics. Ceci implique que les autorités publiques auront encore la possibilité de maintenir des délais de règlement plus longs.

Des droits additionnels pour le créancier en cas de non règlement endéans le délai légal ou contractuel

Pour autant que la livraison ou la prestation de services ait été correctement exécutée, le montant impayé à l’échéance est, à compter du jour suivant, majoré d'un intérêt, à moins que le débiteur puisse démontrer qu'il n'est pas responsable du retard.

Le taux d’intérêt correspond à un taux légal fixé par arrêté royal et mis à jour deux fois par an. A ce jour, ce taux s’élève à 8%.

De plus, dès le moment où un intérêt de retard est dû par simple application de loi, le montant impayé pourra être majoré d'une indemnité forfaitaire de €40 visant à couvrir les frais de recouvrement encourus par le créancier.

Outre ce montant forfaitaire, le créancier a droit à une indemnisation raisonnable pour tous les autres frais de recouvrement venant en sus dudit montant forfaitaire et encourus par suite du retard de paiement, en ce compris, par exemple, l'indemnité de procédure conformément aux dispositions du Code judiciaire.

Ces intérêts et majorations s’effectuent de plein droit et sans mise en demeure, ce qui est toujours bon à savoir !

Impacts au niveau de la comptabilité

Pour le débiteur

Selon la Commission des Normes Comptables, il y a lieu de considérer que la dette d’intérêts est certaine et due de plein droit aussitôt le délai de paiement dépassé. En conséquence, la prudence impliquerait de prendre en charges les intérêts et les indemnités forfaitaires dès le premier jour suivant la date d’échéance du paiement. 

Le débiteur devrait donc acter les écritures suivantes :

  • une dette au niveau du compte 440 Fournisseurs
  • les intérêts et autres charges au niveau d’un compte 6500 dédié aux Intérêts, commissions et frais afférents aux dettes ou au niveau du compte 668 en tant qu’Autres charges financières non récurrentes.

Pour le créancier

Dans son avis du 20 avril 2022, la Commission des Normes Comptables nous rappelle également un autre principe de prudence selon lequel les produits ne peuvent pas être enregistrés dans la comptabilité lorsque leur encaissement effectif est incertain. De ce fait, la prise en résultat par le créancier des sommes dues pour cause du retard de son client ne peut être opérée de manière aussi automatique. A titre d’exemple, ceci peut être le cas lorsque le débiteur s’avère être douteux.

Par contre, dès que le créancier possède une certitude suffisante de récupérer les indemnités additionnelles à l’encontre de son client, le créancier actera les écritures suivantes :

  • une créance d’intérêts et d’indemnités au niveau du compte 400 Clients
  • les intérêts et autres indemnités au niveau d’un compte 751 Produits sur actifs circulants ou au niveau du compte 769 en tant qu’Autres produits financiers non récurrents.

En conclusion

Bien entendu, dans la pratique, il y aura toujours lieu de faire preuve de bon sens avant toute comptabilisation ou mise en œuvre des droits offerts par la loi, en fonction de la teneur des relations commerciales entre le client et son fournisseur.

Afin de ne pas entacher ces dernières, de nombreux fournisseurs n’appliquent pas à la lettre l’application d’un intérêt ou de frais additionnels. Mais il s’agit néanmoins d’un outil intéressant à leur disposition en vue de sanctionner davantage leurs clients récalcitrants ou peu coopératifs. Et donc à utiliser en fonction des besoins spécifiques propres à chacun… A bon entendeur…