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Cession d'actions : caveat emptor (que l’acheteur prenne garde) !

Roeland Vereecken Roeland Vereecken

Lorsque, en tant que cessionnaire, vous reprenez les actions d'une société, le vendeur se portera la plupart du temps garant de la situation de la société, ceci en déposant des déclarations et garanties (" representations and warranties "). Le 4 décembre 2020, la Cour de cassation a prononcé un arrêt mettant les points sur les i pour la détermination de l’indemnisation pouvant être réclamée par un acheteur d’actions au vendeur lorsqu'il s'avère que ce vendeur a déposé des déclarations et garanties qui s'avèrent par la suite incorrectes.

Les faits

Entre les parties au litige, deux contrats de vente d'actions distincts, dans lesquels les actions de différentes sociétés ont été cédées à l’acheteur, ont été conclus en 2011.

Le contrat concernant la vente des actions contient notamment des déclarations et garanties concernant la possibilité de recouvrement de factures, les vendeurs ayant déclaré que, à l’exception des factures qui faisaient l’objet de litiges et figurant sur la liste des litiges, toutes les factures émises par la Société pour des prestations fournies seraient payées au plus tard six mois après l’échéance des factures en question. Des déclarations ont également été faites concernant l’exactitude de la comptabilité.

Ces déclarations se sont finalement révélées incorrectes : un certain nombre de factures n’ont pas été payées, et, par ailleurs, une garantie qui était reprise dans les comptes annuels s’est avérée irrécupérable.

Les acheteurs et les sociétés vendues ont assigné les vendeurs afin d’obtenir une indemnisation. La cour d'appel de Gand a accordé une indemnisation, et ce à concurrence du montant total des factures non payées et de la garantie irrécupérable. Les vendeurs ont fait appel en cassation contre cet arrêt.

Qu’a avancé la Cour de cassation ?

La Cour de cassation a rappelé qu'il s’agissait ici d'une rupture de contrat à l’égard de l’acheteur, c'est à dire le nouvel actionnaire, et pas à l’égard des sociétés visées elles-mêmes. Par conséquent, avance la Cour, " un actionnaire ne peut réclamer, pour rupture d'un contrat conclu par lui, que la réparation de son dommage personnel et non celle du préjudice subi par la société. "

Cela signifie selon la Cour qu'il faut vérifier si le préjudice qui a été démontré dans le chef des sociétés a entraîné une perte de valeur correspondante des actions détenues par l’acheteur ou nouvel actionnaire. Cette distinction entre le dommage personnel de l’acheteur et l’impact financier sur les sociétés n’était selon la Cour pas suffisamment motivée dans l’arrêt de la cour d’appel et par conséquent, l’arrêt de la cour d'appel a été annulé.

Conclusion

Cet arrêt signifie-t-il à présent qu’en cas de cession d’actions, l’impact financier sur la (les) société(s) visée(s) ne peut être réclamé au(x) vendeur(s) ? Heureusement non… mais cela signifie qu’une assistance juridique correcte lors de la rédaction de contrats de reprise n’est absolument pas un luxe. Dans ce cas, s’il avait clairement été stipulé dans le contrat que tout dommage subi par les sociétés devait être considéré sur la base d’un euro pour un euro comme un dommage subi par l’acheteur, le jugement de la Cour de cassation aurait probablement été différent.

Vous voulez en savoir plus à ce sujet ?

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