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Advisory

L'impact de la législation (fiscale) sur les structures de rachat

Peter Vermeiren Peter Vermeiren

La plupart des rachats d’entreprises sont opérés en ayant recours à une structure de rachat. Une nouvelle société est habituellement créée à cet effet (souvent sous le nom opérationnel newco ou spv) qui, en plus des capitaux propres nécessaires, contracte un prêt bancaire substantiel. La banque qui accorde le financement entend évidemment se couvrir autant que possible au moyen de garanties.  Étant donné que la newco ne possède généralement que peu d’actifs autres que les parts de la société absorbée, la banque doit souvent, dans ce scénario, se contenter d’un gage sur actions. Nombreuses sont les institutions bancaires qui tentent de remédier à ce problème par un debt push down, où le prêt ou une partie du prêt est octroyé à la société reprise.

Bien que le droit des sociétés autorise - moyennant le respect de conditions strictes - qu’une assistance financière (financial assistance) soit accordée par la société fille à la société mère newco, cette solution semble n’être que peu utilisée dans la pratique. L’obligation de publication au Moniteur belge, surtout, retient de nombreux entrepreneurs d’opter pour cette solution.

En guise d’alternative à la financial assistance, les entrepreneurs recouraient jusqu’à présent le plus souvent à une réduction de capital ou à un superdividende (un dividende unique important) dans le chef de la société reprise. Cette réduction de capital ou ce dividende est alors financé par la banque. La banque parvient ainsi au résultat visé: la société reprise doit rembourser les dettes liées à son rachat.

Une jurisprudence récente soulève toutefois un problème fiscal: plusieurs cours d’appel ont en effet décidé que les charges d’intérêts en vue du financement d’une réduction de capital et/ou d’une distribution de dividendes ne sont pas déductibles fiscalement. Cette jurisprudence est basée sur l’exigence légale qui veut que les frais professionnels doivent avoir pour but d’acquérir ou de conserver des revenus imposables.

Ce point de vue est vivement critiqué dans la littérature spécialisée. Il y est souvent dit que les cours d’appel confondent les passifs et les actifs, et que seuls les actifs doivent être évalués à la lumière de la condition de finalité de l’article 49 CIR 1992, qui est ‘d’acquérir ou de conserver des revenus imposables’.

Sans doute le fisc invoquera-t-il les arrêts des cours d’appel en vue de contester la déductibilité fiscale des frais de financement de rachats d’entreprises avec refinancement des capitaux propres.

Il semble toutefois que les entreprises en question aient toujours présenté des arguments insuffisants pour justifier les transactions exécutées. Il convient, selon nous, de réfléchir à des solutions potentielles, telles que la documentation détaillée de la nécessité des opérations exécutées, la demande d’un ruling ou une structure financière alternative.

La distribution d’un superdividende à la société mère, suite à une vente d’actions par un particulier, n’est pas non plus sans risque pour le vendeur, puisqu’il se peut que le fisc tente d’imposer partiellement voire entièrement ce dividende dans le chef de ce dernier. Le fisc risque en effet de suspecter un abus fiscal si les liquidités excédentaires ne sont pas distribuées préalablement à la vente sous la forme d’un dividende imposable dans le chef du vendeur, mais qu’elles viennent s’ajouter à la plus-value exonérée en tant que partie du prix de vente.

À noter que, dans cette matière, nous ne pouvons pas nous baser sur la jurisprudence étant donné qu’il s’agit d’un angle d’attaque relativement récent du fisc. À nouveau, le niveau de risque dépendra des faits concrets et de la documentation disponible concernant les diverses transactions.