TVA

Location d’immobilier d’entreprise en Belgique

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Règle générale : la location d’immeubles est exonérée de TVA

En Belgique, la location d’un bien immobilier est exonérée de TVA. Il en va de même pour la vente ou la constitution de droits réels (emphytéose, usufruit, etc.) sur un bien immobilier, sauf si ce bien est encore considéré comme neuf au regard de la TVA. 

Dans ce dernier cas, un « promoteur professionnel » doit obligatoirement soumettre la vente (ou la constitution/transfert de droits réels) à la TVA, tandis que d’autres assujettis ou non-assujettis peuvent choisir d’appliquer ou non la TVA. Cette exclusion de principe de la TVA sur la location d’immeubles est prévue à l’article 44, §3, 2° du Code de la TVA.

Évolution historique de la législation TVA sur l’immobilier

Jusqu’en 2019, la législation belge ne prévoyait, sauf exceptions spécifiques, aucune possibilité de soumettre la location d’immeubles à la TVA, même entre deux parties professionnelles assujetties à la TVA dans le cadre de leurs activités. La Belgique faisait ainsi figure d’exception en Europe. 
Les directives européennes à la base de la législation TVA permettaient pourtant aux États membres de prévoir l’option de soumettre la location immobilière professionnelle à la TVA. Presque tous les États membres ont utilisé cette option, sauf la Belgique et la Grèce.

Impact pratique de l’exonération de TVA

L’impossibilité de soumettre la location à la TVA avait pour conséquence que les investisseurs immobiliers professionnels ne pouvaient pas récupérer la TVA supportée sur leur patrimoine immobilier en l’absence d’opérations soumises à la TVA. 

Cette TVA pouvait être payée lors de l’achat d’un bien neuf, de la (re)construction, de l’entretien ou des réparations. Faute de pouvoir récupérer cette TVA, les propriétaires la considéraient comme un coût/investissement et fixaient leur loyer de manière à obtenir un rendement également sur ce montant.

Exemple fictif

  • Un investisseur achète un immeuble de bureaux neuf pour 1.000 €. Comme il s’agit d’un bien neuf, le vendeur applique la TVA sur le prix de vente. L’investisseur paie donc 1.000 € + 21 % de TVA, soit 210 €.
  • Il vise un rendement annuel de 6 %.
  • S’il pouvait récupérer la TVA, son investissement serait de 1.000 € et il viserait un loyer annuel de 60 € (6 % de 1.000 €).
  • Comme il ne pouvait pas récupérer la TVA, l’investissement est de 1.210 € et il souhaite un loyer annuel de 72,6 €.
  • La différence de 12,6 € correspond à de la TVA « invisible » répercutée dans le loyer. Si cette somme était facturée comme TVA effective, le locataire professionnel pourrait généralement la récupérer. Cette TVA récupérable ne serait donc pas un coût pour le locataire, contrairement au loyer plus élevé.

D’un point de vue économique, cela était considéré comme une charge évitable. C’est pourquoi le législateur est intervenu en 2018 et a prévu, pour l’immobilier professionnel, une option générale permettant de soumettre la location à la TVA, sous certaines conditions détaillées ci-dessous.

Obligation de facturer la TVA dans certains cas de mise à disposition

Certains cas de location (ou de mise à disposition) doivent obligatoirement être soumis à la TVA :

  • Les « mises à disposition actives complexes » : il s’agit de prestations où la mise à disposition de l’immeuble n’est qu’une partie d’un ensemble indissociable de services (ex. espaces de coworking).
  • Certaines « mises à disposition passives » prévues par la loi, comme la location de parkings ou la location de vacances (hors du champ de cet article).
  • La mise à disposition d’un bâtiment (ou partie) comme espace de stockage à des personnes qui ne l’utilisent pas dans le cadre d’une activité économique, pour autant que plus de 50 % de la surface soit destinée au stockage et moins de 10 % à la vente.
  • La mise à disposition d’un bien immobilier pour une période de maximum 6 mois, hors usage résidentiel (avec exceptions).

Dans ces cas, la déduction initiale de la TVA est soumise au régime classique de révision sur 15 ans et non à la période spécifique de 25 ans (voir ci-après).

La possibilité classique de soumettre à la TVA des droits réels (usufruit, emphytéose) sur des bâtiments « neufs » (jusqu’au 31 décembre de la deuxième année suivant la première utilisation) subsiste également.

Cet article n’aborde pas davantage les cas de mise à disposition obligatoirement soumis à la TVA, ni la possibilité de droits réels taxés ou l’application de taux réduits. Nous nous limitons ici aux cas où il existe une option pour soumettre la location à la TVA : la « taxation optionnelle », tant pour les espaces de stockage que pour d’autres locaux.

 

Possibilité d’opter pour la TVA sur la location d’immeubles

Depuis le 1er janvier 2019, le bailleur peut choisir de facturer la TVA sur la location d’immobilier professionnel (autre que ceux cités ci-dessus), conformément à l’article 44, §3, 2°, d) du Code de la TVA.

L’avantage principal est que le bailleur peut, en louant avec TVA, récupérer toute la TVA sur son investissement. Le locataire, étant lui-même assujetti à la TVA, il pourra généralement aussi la déduire. Le coût de la TVA est ainsi « neutralisé ».

La déduction de la TVA par le bailleur est toutefois soumise à une période de révision (voir ci-après).

Quand peut-on facturer la TVA sur le loyer ?

Le propriétaire peut soumettre la location à la TVA si les cinq conditions suivantes sont remplies :

  1. Il s’agit de la location d’un bâtiment ou d’une partie de bâtiment (la location de terrain seul est exclue, sauf s’il est loué avec le bâtiment).
  2. Le locataire est assujetti à la TVA et utilise le bien exclusivement pour son activité économique (cela inclut aussi les assujettis partiellement exonérés, comme les médecins ou les banques, qui seront cependant moins enclins à louer avec TVA).
  3. Le bailleur et le locataire optent ensemble, explicitement, pour la TVA (cette option doit être formalisée, généralement dans le contrat de bail, avec mention des numéros de TVA).
  4. L’option s’applique pour toute la durée du bail (elle est irrévocable pendant le contrat).
  5. La location porte sur un bâtiment neuf (la TVA sur la construction doit être exigible à partir du 1er octobre 2018 ; les honoraires d’architecte ou d’études de stabilité ne sont pas pris en compte pour cette date).

    Remarque : il existe désormais deux notions de « neuf » pour l’immobilier.

 

Location d’espaces de stockage : de l’obligation à l’option TVA

Depuis le 1er janvier 2019, la location d’espaces de stockage (pour plus de 6 mois) à un preneur qui les utilise exclusivement pour son activité économique n’est plus obligatoirement soumise à la TVA, mais peut l’être sur option (https://monkey.wolterskluwer.com/nl/document/ln205837-5344/explore/ln1068-73?searchId=3440321750). Il doit s’agir d’un bâtiment (ou partie) utilisé à plus de 50 % pour le stockage et à moins de 10 % comme espace de vente (« showroom »).

Le fait que le bâtiment ait été construit avant le 1er octobre 2018 n’est pas un obstacle (contrairement à la règle pour la taxation optionnelle classique). Les autres conditions de l’option TVA doivent également être remplies.
TVA sur la valeur normale minimale de la location

Pour une location entre parties liées, le loyer soumis à la TVA doit être au moins égal à la « valeur normale » (en principe, le loyer de marché).

Période de révision pour le bailleur

La récupération de la TVA sur l’acquisition ou la construction du bâtiment par le bailleur est soumise à une période de révision.
Si, pendant cette période, le bâtiment n’est plus utilisé à des fins soumises à la TVA, une partie de la TVA initialement déduite doit être remboursée à l’État.

Période de révision TVA : 15 ans versus 25 ans

Le législateur a introduit une période de révision spécifique de 25 ans (au lieu de 15 ans). Cette durée, non prévue par les directives européennes, est parfois contestée. Sa longueur et la complexité qu’elle engendre constituent le point faible du régime.

Ainsi, un bâtiment loué avec TVA ne sera plus considéré comme neuf (au sens TVA) après le 31 décembre de la deuxième année suivant sa première utilisation. Une vente ultérieure serait alors soumise aux droits d’enregistrement et non à la TVA, ce qui pourrait entraîner une révision de la TVA initialement déduite. La location resterait toutefois soumise à la TVA pour l’acheteur, grâce à une disposition spécifique (article 21quater de l’AR de 2019) qui évite une révision immédiate de la TVA dans ce cas.

Conclusion

La location avec TVA de biens immobiliers professionnels peut être un outil puissant pour les entrepreneurs investissant dans l’immobilier.
La pratique reste cependant complexe, et il est essentiel de structurer correctement ces opérations et de faire les bons choix dès le départ.